#15 – Breakfast In América – Supertramp

Après ce petit troll du mois d’avril, et un petit break au pays du soleil levant, on enchaine avec un petit-dèj copieux pour la reprise.

Sorti en mars 1979, Breakfast in America est sans doute l’album le plus emblématique de Supertramp, groupe britannique qui s’est imposé dans les années 70 comme un pont subtil entre rock progressif et pop mélodique. Avec plus de 20 millions d’exemplaires vendus dans le monde, ce disque est bien plus qu’un succès commercial : c’est une œuvre finement construite, à la fois accessible et pleine de nuances.

Une Amérique vue d’ailleurs

Le titre, Breakfast in America, évoque une vision fantasmée des États-Unis, filtrée par le regard à la fois fasciné et critique de deux Britanniques — Roger Hodgson et Rick Davies — qui n’ont jamais vraiment caché leur ambivalence envers le rêve américain. Enregistré à Los Angeles, l’album ne cherche pas à faire l’éloge d’un pays, mais plutôt à en observer les travers avec un humour discret et un soupçon de mélancolie.

La pochette, d’ailleurs, est un petit bijou de second degré : la serveuse Debbie, en uniforme de diner, brandit un verre de jus d’orange façon Statue de la Liberté, le tout devant une skyline new-yorkaise faite… de boîtes de céréales et de vaisselle. Toute une époque résumée en une image : brillante, un peu kitsch, mais jamais dénuée de sens.

Des chansons ciselées pour les esprits en éveil

Musicalement, Breakfast in America est un modèle d’efficacité. Le groupe y affine sa formule : des compositions accrocheuses, des arrangements d’une grande richesse (mention spéciale aux claviers et aux cuivres), et des paroles plus profondes qu’il n’y paraît.

  • The Logical Song est sans doute le morceau le plus marquant. Derrière ses airs de comptine pop se cache une réflexion sur l’absurdité de l’éducation moderne et la perte d’identité à l’âge adulte. C’est simple, direct, et étonnamment universel.
  • Goodbye Stranger et Take the Long Way Home complètent un trio d’ouverture redoutable, entre introspection douce-amère et mélodies immédiatement mémorisables.
  • Le titre éponyme, Breakfast in America, avec son piano sautillant et sa mélodie entêtante, tranche volontairement avec des paroles un peu amères. L’ironie n’est jamais très loin, mais elle reste élégante.

Pop, mais pas creux

Si Breakfast in America s’éloigne du rock progressif pur des débuts du groupe, il ne cède jamais à la facilité. Les structures restent travaillées, les harmonies souvent sophistiquées, et chaque chanson porte la marque d’un groupe au sommet de son art. Le tandem Hodgson/Davies fonctionne ici à merveille, chacun apportant sa couleur : spirituelle et éthérée chez Hodgson, plus terre-à-terre et bluesy chez Davies.

Une écoute toujours aussi pertinente

Plus de 40 ans après sa sortie, Breakfast in America n’a rien perdu de sa fraîcheur. Il réunit ce que la pop fait de mieux : la clarté des mélodies, la richesse des arrangements, et une touche d’ambiguïté qui empêche l’album de sombrer dans le simplisme.

Écouter cet album aujourd’hui, c’est se replonger dans une époque où la musique mainstream savait encore prendre des risques, où les tubes pouvaient soulever des questions existentielles, et où une simple chanson pouvait résumer le vertige de grandir dans un monde trop rapide ( Ok Boomer ? ).

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