#19 – Manifest Destiny – The dictators

Il y a des groupes qui avancent droit dans leurs bottes, prêts à mordre le monde avec leurs riffs crasseux. Et puis il y a les Dictators, formation new-yorkaise pas vraiment réputée pour sa discrétion, qui, en 1977, a surpris son monde avec Manifest Destiny. Un album où le proto-punk mal rasé des débuts s’offre soudain une coupe de cheveux presque correcte et un son plus… civilisé. Oui, civilisé. Enfin, à leur manière.

Le tournant d’un groupe en pleine mutation

Produit par Murray Krugman et Sandy Pearlman (les cerveaux derrière Blue Öyster Cult), l’album marque un virage sonore évident. On s’éloigne du bazar jouissif de Go Girl Crazy! pour lorgner vers un rock plus costaud, plus FM, moins garage. Les guitares brillent, la production est carrée, parfois trop, au point que certains fans de la première heure ont crié à la trahison.

Mais attention : même avec ce vernis plus propre, les Dictators restent les Dictators. Il y a toujours ce petit parfum de sarcasme, cette énergie qui déborde, ce côté. Disons que la bande a troqué les canettes de bière tièdes pour des verres à pied… tout en gardant les baskets.

Entre ambition et rébellion

Ce qui frappe à l’écoute de Manifest Destiny, c’est cette hésitation permanente : veut-on séduire le grand public avec des refrains plus accessibles, ou continuer à incarner cette insolence punk qui faisait tout le sel du groupe ? Résultat : un disque hybride, ni tout à fait rebelle ni complètement docile, avec quelques éclairs de génie et d’autres moments plus… discutables.

La critique, à l’époque, n’a pas toujours été tendre. Trop produit pour les puristes, pas assez commercial pour les radios. Un entre-deux qui, avec le recul, donne pourtant à l’album un charme particulier : celui des groupes qui cherchent, qui tâtonnent, et qui, au passage, livrent quelques pépites qu’on n’avait pas vu venir.

Pourquoi l’écouter aujourd’hui

Parce que Manifest Destiny raconte un moment précis de l’histoire du rock, celui où les frontières entre punk, hard rock et pop commençaient à se brouiller. Parce qu’il y a une vraie sincérité derrière cette tentative d’évoluer, de grandir… sans jamais totalement renier ses origines. Et parce qu’au fond, on aime bien voir les Dictators essayer de se tenir droit, tout en sachant très bien qu’ils finiront par tout foutre en l’air au morceau suivant.

Bref, un album à (re)découvrir, pas pour sa perfection, mais pour son audace maladroite et son énergie toujours contagieuse.

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